• Vers la Tchécoslovaquie

     

    Au seuil du xxe s., les Slovaques cherchent des appuis à l’extérieur, d’abord parmi les émigrés aux États-Unis, qui forment une colonie active, puis parmi les intellectuels occidentaux, tels l’Anglais R. W. Seton-Watson, le Français Ernest Denis, l’écrivain norvégien Björnson. En même temps, des courants politiques nouveaux apparaissent. Dans le peuple des campagnes, c’est le parti populiste, catholique, de l’abbé Andrej Hlinka (1864-1938). Parmi les intellectuels catholiques, le groupe Hlas (la Voix), de 1898 à 1904, avec Vavro Šrobár (1867-1950) et Pavol Blaho (1867-1927), critique les politiciens slovaques et appelle à une action commune avec les nationalistes tchèques, notamment avec Tomáš Garrigue Masaryk*, qui, demi-slovaque lui-même, veut renforcer les contacts entre les deux mouvements nationaux. D’ailleurs, l’intérêt des Tchèques pour la Slovaquie se montre plus intense à la veille de la Première Guerre mondiale : les banques de Prague investissent des capitaux dans la banque slovaque ou dans les industries du bois.

    En 1901, le parti national slovaque reprend son activité et sa propagande, surtout grâce à son aile gauche, que forment Šrobár et l’agrarien Milan Hodža (1878-1944).

    Les Slovaques se trouvent mobilisés dans la guerre avec les armées austro-hongroises. Lorsque les émigrés de Paris et de Londres commencent à élaborer leurs revendications, ils réclament d’abord l’indépendance des pays tchèques au nom du droit historique ; plus tardivement, ils décident d’adjoindre au nouvel État la Slovaquie au nom du droit naturel. À côté du Tchèque Edvard Beneš et du Morave Masaryk, la puissante personnalité du Slovaque Milan Rastislav Štefánik (1880-1919) exerce son influence après février 1916. Ce fils de pasteur, naturalisé français, astronome, capitaine d’aviation dans l’armée française, éveille les sympathies en France et en Italie en faveur de l’État tchécoslovaque. Ministre de la Guerre dans le gouvernement provisoire, il se tue malheureusement dans un accident d’avion le 4 mai 1919, lors de son retour dans sa patrie.

    Le mouvement d’indépendance a trouvé un appui en argent et en hommes dans la colonie slovaque des États-Unis ; le 30 mai 1918, lors de son voyage aux États-Unis, Masaryk signe avec les organisations slovaques en Amérique les accords de Pittsburgh, qui prévoient l’autonomie de la Slovaquie et la reconnaissance du slovaque comme langue officielle. Mais ces accords, considérés comme des engagements privés, ne seront pas appliqués par le nouveau gouvernement.

    La Slovaquie tient à exprimer elle-même sa volonté d’union avec les Tchèques. Le 30 octobre 1918, le Conseil national slovaque, réuni à Turčiansky Svätý Martin, se prononce en faveur du nouvel État. Mais, en fait, dans la situation confuse de l’automne de 1918, le pouvoir réel se situe à Prague, qui prend toutes les décisions. Les légionnaires tchécoslovaques doivent conquérir la Slovaquie, qu’occupent encore les troupes hongroises. Bratislava n’est libérée qu’en février 1919. La question la plus brûlante est celle des frontières d’une Slovaquie dont les limites n’ont jamais été définies. Seront-elles ethnographiques ? En fait, mettant à profit la guerre contre la république des Conseils hongrois, d’avril à juin 1919, la Tchécoslovaquie se fait reconnaître le 12 juin par les grandes puissances une frontière plus au sud que la frontière ethnique, qui lui permet le contrôle des voies ferrées d’ouest en est. La Slovaquie englobe donc une forte minorité hongroise (745 000 personnes en 1921) dans la Tchécoslovaquie de l’entre-deux-guerres (1918-1939).


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